Une dizaine d’années plus tôt, l’association Planète Bleue avait organisé une vaste campagne de sensibilisation à la lutte contre le réchauffement climatique, une action de mise en garde et d’information sur les dégâts provoqués par les déchets plastique sur la faune et la flore du ruisseau de la Clarée dans les Hautes-Alpes. Il s’agissait d’enseigner les petits gestes du quotidien permettant de protéger l’environnement pour garantir à tous une meilleure qualité de vie. Le slogan “Recyclez-moi” avait été imprimé sur des ballons de couleurs distribués aux bambins en même temps que des moitiés de pommes cuites au four. Pour punir son fils qui refusait d’obéir, un père de famille jeta son ballon rouge dans les fourrés où il se creva. L’homme qui s’était laissé emporter par l’agacement n’imaginait pas les conséquences que son geste produirait à court, à moyen et à long terme.
Personne ne récupéra les lambeaux tombés dans le ruisseau qui coulait dans le sous-bois. Le plastique déchiré continua tranquillement sa descente dans la vallée, entre les rives verdoyantes couvertes de jolies fleurs mauves, jaunes et blanches au pied des sapins, non loin d’un pittoresque pont de pierre et au milieu des têtards et des populations d’invertébrés aquatiques. Il termina sa course la tige accrochée à une pierre, y demeura jusqu’à la fin de l’automne. Nul ne daigna le ramasser. Les mois passèrent, le plastique, recouvert d’une fine pellicule visqueuse composée de bactéries, se figea lorsque le cours d’eau gela durant l’hiver particulièrement rigoureux qui suivit. Pourtant, son processus de fragmentation avait bel et bien débuté.